un entretien avec les sociétés prestataires autour de Koha

open source 1Le choix d’une solution libre ne peut reposer que sur des critères techniques, financiers ou encore idéologiques. La taille de la communauté (utilisateurs + développeurs), son niveau de maturité fonctionnelle (compétence des acteurs, performance des outils de travail et de communication, qualité de la documentation) ainsi que la composante « politique » de l’organisation (structure, échelle des responsabilités, processus de décision…) sont également des indicateurs précieux de mesure de la performance et de la viabilité du produit.

Mais ajoutons un autre élément d’appréciation, élément sans lequel les conditions d’intégration (migration des données, formation des utilisateurs, déploiement de l’application, maintenance évolutive) et de pérennisation de l’outil ne pourraient être garanties : le nombre et la qualité des sociétés prestataires de serviceen activité autour du logiciel open source

Koha oeufEn ce qui concerne Koha, il y en a actuellement 3 en France, la société Pulcra venant tout récemment de rejoindre ses grandes sœurs Biblibre et Tamil

Alors pour mieux connaître ces partenaires du libre, leurs structures, leurs positionnements et leurs regards respectifs sur Koha,  Bambou s’est fendu d’un petit questionnaire auquel Frédéric Démians (Tamil), Nicolas Morin (Biblibre) et Daniel Vanderborght (Pulcra) ont aimablement bien voulu répondre.

Quels sont vos domaines d’expertise et champs d’intervention ?

F.Démians : « Tamil fournit des solutions clés-en-main aux centres de documentation et aux bibliothèques spécialisées, mais aussi de plus en plus aux bibliothèques municipales. Société de services orienté-client, développant une relation client sur le long terme, Tamil fournit des réponses évolutives aux besoins exprimés par les documentalistes et les bibliothécaires. A la fois informaticiens et spécialistes de l’info-doc, les consultants Tamil ont une excellente connaissance de tous les logiciels documentaires et de tous les SIGB du marché français et du marché américain, ainsi que des technologies et des normes connexes. Cette approche globale se matérialise dans l’offre Tamil e-Biblio Service, solution hébergée construite autour de Koha »

N.Morin: « BibLibre est une société de services en informatique documentaire. Nous ne vendons pas de logiciels, nous vendons des compétences à la croisée de l’informatique et de la bibliothéconomie. Nous ne sommes ni des consultants (nous sommes dans la réalisation), ni des éditeurs de logiciels. Biblibre a vocation à intervenir dès qu’une bibliothèque a un besoin de compétence informatique : nous utilisons des logiciels libres dans le cadre de nos interventions. Il n’y a pas de limite fonctionnelle a priori à nos interventions, et nous pouvons aussi bien traiter de la problématique du SIGB dans un établissement que du site web, ou de l’intégration dans le portail institutionnel »

David Vanderborght : « Systèmes de gestion d’information des bibliothèques, médiathèques, centres de documentation et musées en secteur public et privé. Maître d’ouvrage et maîtrise d’œuvre de solutions complètes : SGRE(Euris) / SIGB (Koha) / CMS (Typo3-Joomla) »

Peut-on parler d’une “éthique” Tamil ?

F.Démians : « Non sans appréhension. Ce serait une “éthique” de “l’artisanat”. Conservons les guillemets à éthique, ajoutons-en à artisanat. Tamil n’est rien d’autre chose que le boucher du quartier qui choisit et prépare avec soin le filet mignon et chez qui l’on revient, ou bien le plombier dont on s’échange l’adresse parce qu’il a été de bon conseil. Il faudrait bien plutôt poser cette question à un client de Tamil »

…………………………………….. Biblibre ?

N.Morin : « Ce serait présomptueux. Nous pensons que les relations entre bibliothèques et prestataires informatiques ont besoin d’être ré-équilibrées et d’évoluer d’une logique de fourniture (de logiciel) à une logique de service (de prestations), ce qui implique un rapport de partenariat dans la durée entre les bibliothèques et les prestataires. Une bibliothèque confie à BibLibre un contrat de maintenance et le renouvelle l’année suivante parce qu’elle est satisfaite du travail fait : le logiciel étant libre, elle n’a aucune obligation juridique de renouvellement. Ce n’est pas une éthique, c’est un état de fait. Sain »

……………………………………… Pulcra ?

David Vanderborght : « Notre éthique s’appuie sur des process de gestion de projet impliquant l’ensemble des équipes administrative, commerciale, développement et technique. Notre gestion de projet  s’appuie sur la méthodologie ITIL, référence en la matière »

Combien êtes-vous dans votre société ? vos profils  ?

F.Démians : « Trois sur Paris. Deux en région. Deux informaticiens systèmes. Une philosophe devenue informaticienne. Deux bibliothécaires »

N.Morin : « Les personnels de BibLibre sont soit des personnels de bibliothèque, qui ont exercé sur le terrain, soit des informaticiens. Il n’y a aucun autre profil dans la maison. Il n’y a pas de commerciaux en particulier. Nous restons une petite société, avec moins de 10 personnes, dont deux profils bibliothèque »

David Vanderborght : « 11 personnes / Equipes techniques : techniciens niveau BTS informatique – ingénieur réseau système – MSCE Microsoft- certifié ITIL, CISCO, CITRIX ; Equipe développement : ingénieur programmeur – développeur  web formé typo3 ; Equipe technico commerciale : DESS informatique documentaire ENSSIB »

Où êtes-vous installés ? Travaillez-vous à distance ?

F.Démians : « Paris. Deux personnes en-dehors de Paris : Montauban et Nantes. Oui, nous travaillons à distance, pour des clients dans toute la France et à l’étranger, et nous travaillons même principalement dans “les nuages” : cloud computing »

N.Morin : « Le siège de la société est à Marseille. La plupart d’entre nous sommes en télétravail : en Alsace, à Montpellier, à Lyon. Nous sommes une société résolument « web » : on chat, on skype, on co-browse. Sauf quand on doit se déplacer, ce qui est, pour certains d’entre nous, fréquent : jusqu’à 90 jours par an »

David Vanderborght : « Deuil la barre, 95170 (20 mn de l’étoile (Paris)). Le travail à distance est un paramètre essentiel dans notre cœur de métier, nous permettant une réactivité optimisée (télémaintenance et visio/téléconférence) »

Vos prestations (clients) les plus importantes ?

F.Démians : « Un réseau de centres de documentation gérant une base commune de plus de 300.000 références bibliographiques avec fourniture des documents primaires. Le réseau des centres de documentation d’un ministère à l’étranger

N.Morin : « La notion de projet « important » est toute subjective. Ce ne sont pas nécessairement ceux qui représentent le montant financier nominalement le plus important. Pour nous, ces derniers mois, quelques projets nous ont particulièrement tenu à coeur:

– le SAN Ouest Provence (à tout seigneur tout honneur), en particulier parce que pour la première fois cette année, nous assurons la maintenance de cette bibliothèque, la plus importante bibliothèque de lecteur publique française à utiliser Koha jusqu’ici. BibLibre a des relations de longue date avec le SAN, mais qui ne portaient pas, jusqu’à ce jour, sur une relation de suivie et de maintenance régulière, mais plutôt sur une suite de projets. Ce changement était important pour nous dans la mesure où c’est l’aboutissement et la poursuite d’une relation importante, et une marque de confiance accordée par un établissement qui connaît bien BibLibre et nous a donc fait confiance pour sa maintenance en connaissance de cause.

– le passage à Koha de la médiathèque de Montauban est aussi un joli projet mené dernièrement. Parce que c’est une seconde BM de taille importante (environ 170.000 documents), parce que Montauban a choisi une solution entièrement hébergée chez nous, enfin parce que nous avons bouclé le projet en un temps record: le serveur du SIGB précédent ayant rendu l’âme, la bibliothèque nous a demandé de mettre en place Koha dans l’urgence, et nous avons le sentiment d’avoir su bien réagir à ces imprévus.

– la poursuite du projet des BU de Marseille a aussi bien sûr été un point important de notre dernier semestre, et nous avons dans ce cadre fait de nombreux développements que nous allons pouvoir mettre à disposition des établissements dans les derniers mois de 2009

Mais nous continuons à faire des projets de toute taille, et à prendre du plaisir à aller voir de nouveaux établissements, suivre des projets différents à chaque fois.

David Vanderborght : « Pulcra, nouvel acteur sur le marché des SIGB, a opté pour Koha de par sa collaboration avec le SAN Ouest Provence dans le cadre de l’interconnexion de Koha et de son système Euris. L’expertise du SAN a convaincu Pulcra de la réelle valeur ajoutée de Koha dans le système d’information des bibliothèques et de sa totale complémentarité de l’offre logicielle proposée par Pulcra aujourd’hui. Pulcra est, par ailleurs, familier avec la récupération des données des SIGB tant au niveau du fichier des inscrits que de la récupération et l’intégration des données « notices » du système. Pulcra est ainsi convaincu que son expérience dans ce domaine pourra contribuer activement au développement de Koha. De plus, Pulcra est à même d’apporter un élément aujourd’hui encore fragile au sein des projets Koha : assurer la maintenance et le suivi du SIGB »

Quels sont, selon vous, les principaux atouts de Koha ?

F.Démians : « Son inclusivité. La vraie richesse de Koha, c’est la communauté mondiale de ses utilisateurs et de ses développeurs, son ouverture à toute contribution, l’esprit de coopération qui anime ses membres »

N.Morin : « D’avoir un bon OPAC. Au goût du jour. Web 2.0. D’être dans un contexte dynamique, qui fait que le logiciel évolue, progresse, que de nouvelles fonctionnalités apparaissent. D’être ouvert, non seulement du point de vue de la licence, mais du point de vue technique : on peut facilement exporter des données, se connecter à un annuaire LDAP, accéder au compte lecteur via un web service. Koha est facile à intégrer dans un environnement informatique global »

David Vanderborght : « Son interface pro full web multi plateformes – ergonomie graphique et fonctionnelle,  simple et intuitive – licence open source et communauté internationale – mise en place de l’architecture simple et fluide. Flexibilité en terme de catalogage – fonction Z3950 d’import des notices paramétrable –  gestion multisites – multilinguisme – interconnexion possible avec d’autres logiciels (Euris, Typo3…) permettant son intégration dans le système d’information globale du client – personnalisation graphique de l’OPAC par templates- recherche simple et avancée, fonction de nuage de mots et d’étagères virtuelles.

Quel regard portez-vous sur l’évolution de Koha et, plus largement, sur celui des produits open source en bibliothèque ?

F.Démians : « Ma boule de cristal n’étant pas moins opaque que la vôtre, je vois, je vois, ou je souhaite voir Koha se concentrer sur un cœur métier bibliothèque hautement optimisé et se scinder en modules fonctionnels enfichables indépendants les uns des autres. De là, Koha sera le centre d’une constellation de services open source répondant chacun aux besoins très spécifiques et très nouveaux des bibliothèques à mesure que celles-ci s’adapteront aux évolutions de leur environnement »

N.Morin : « Koha continue de monter en charge : la version 3.0 en août 2008 a permis d’avoir un bon moteur d’indexation (Zebra), ce qui permet de servir des catalogues très importants en volume. Les modules tirent parti, petit à petit, de cette nouvelle réalité en permettant, par exemple, des fonctionnements plus complexes dans des bibliothèques plus importantes. Pour ce qui concerne les logiciels open source en général, la diffusion de certains logiciels particuliers, comme Koha, est rapide en France par rapport aux autres pays Européens, mais la diffusion des logiciels open source en général est plutôt plus importante ailleurs et correspond aussi à un investissement des bibliothèques elles-mêmes dans ces logiciels. Il faut, en France, qu’on puisse aller au-delà de Koha pour permettre une diffusion de l’open source en général. Ce n’est pas encore le cas »

David Vanderborght : « Koha se reposant sur une communauté très active, l’évolution du produit répond aux besoins exprimés dans les forums. Cette réactivité offre à nos clients un produit à jour et évolutif, leur permettant d’envisager des fonctions adaptées à la gestion quotidienne d’un SIGB. L’intérêt d’un projet open source comme Koha est que les bibliothécaires sont à même d’interagir avec les développeurs en direct, permettant une adéquation complète du produit aux besoins réels du métier »

6 Réponses

  1. […] comme ce fut le cas avec lesdites sociétés (voir ici et là), Bambou a souhaité mieux connaître ces nouveaux acteurs du libre en interrogeant Franck […]

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  4. […] passe à une autre étape Posté sur 16 avril 2010 par Bambou Acteur important au sein de la planète des prestataires autour de Koha, la société Biblibre nous informe, entre autres, de sa nouvelle recrue, en la […]

  5. C’est formellement exact et même si j’ai pris soin de préciser que la société Pulcra vient « tout récemment » de rejoindre Biblibre et Tamil, il convient en effet de noter que Pulcra n’a pas encore concrètement assuré de prestations de service autour du logiciel Koha.
    Connaissant la maturité commerciale de cette entreprise (qui a passé l’âge des effets d’annonce), j’ai cru bon d’anticiper sur la réalité de son engagement autour de Koha pour prouver, s’il en est besoin, que l’essor de ce logiciel libre en France peut être désormais supporté par plusieurs sociétés prestataires, ce qui, en plus de créer des emplois, est un gage supplémentaire de pérennisation du produit.

  6. Intéressant de noter que dans la communauté koha.org, pour être listé dans la liste des « prestataires Koha », il faut avoir fait la preuve d’au moins une installation chez une bibliothèque cliente.
    Le critère ici est différent (si je suis dans l’erreur sur ce point, n’hésites pas à me corriger), et je me demande dans quelle mesure on peut parler de « société prestataire » quand il n’y a pas (encore) de prestation réalisée.

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